Lignée de l’Inde au Japon

Moines en méditation assise - Zazen

Le zen est l’essence de toute expérience religieuse, en ce sens qu’il nous met en relation avec notre réalité ultime. Cette expérience a été transmise jusqu’à nous par plus de 90 générations de Patriarches et de Maîtres.

Du Bouddha aux patriarches indiens

Shakyamuni Bouddha enseigna jusqu’à sa mort à quatre-vingts ans. Lors d’un sermon qu’il fit sur le Pic des Vautours en Inde, le Bouddha tourna une fleur entre ses doigts en souriant silencieusement. Seul Mahakashyapa, l’un de ses disciples, comprit son geste et sourit à son tour, devenant ainsi le premier patriarche. Selon la tradition bouddhiste zen, la lignée qui naquit à ce moment-là n’a pas été interrompue jusqu’à aujourd’hui.

De l’Inde à la Chine, de Dhyāna au Chan

Même si la transmission de patriarche en patriarche reste partiellement légendaire pour ce qui est de l’Inde, la lignée que débuta Bodhidharma en Chine au cinquième siècle de notre ère est attestée historiquement. Bodhidharma est considéré comme le vingt-huitième patriarche depuis Shakyamuni et le premier à avoir apporté la transmission du zen d’Inde en Chine.

Le bouddhisme y était déjà bien implanté lorsque son bateau accosta cette terre orientale, mais sa pratique se résumait essentiellement au respect des règles monastiques et à l’étude des soutras, enseignements du Bouddha transposés par écrit. Ainsi l’enseignement révolutionnaire de Bodhidharma, tranchant nettement avec ce qui était déjà connu, fut mal accueilli, notamment par l’empereur déconcerté par l’entrevue qu’il eut avec le maître. L’empereur Wu, fervent propagateur du bouddhisme lui demanda quels mérites lui vaudraient ses actions pour ses incarnations futures. « Aucun mérite. » lui répondit Bodhidharma. L’essence du bouddhisme ? « Un grand ciel vide, rien de sacré. » « Mais alors, qui est en face de moi ? », lui demanda l’empereur pour finir. « Je ne sais pas. »

Réalisant que les chinois n’étaient pas encore prêts à recevoir son enseignement, Bodhidharma se retira dans une grotte pour y pratiquer zazen pendant neuf ans.

Entre Bodhidharma et Eno, le sixième patriarche du zen chinois, le zen se forma et atteignit sa maturité, notamment en s’imprégnant de la pensée taoïste.

Après Maître Eno les écoles commencèrent à proliférer, utilisant des méthodes d’enseignement différentes, mais nombre d’entre elles s’éteignirent au cours des années et des siècles. Les deux écoles principales qui virent le jour à cette époque et qui subsistent encore aujourd’hui sont le Zen Rinzai et le Zen Soto.

La première base son enseignement sur l’étude des koan dans le but d’atteindre l’éveil, tandis que l’autre insiste sur une pratique silencieuse et sans but du zazen.

Toujours est-il que ce sont les successeurs de Maître Eno qui firent la grande époque du Chan (zen chinois) avec des maîtres éminents aux noms de Baso, Hyakujo, Tozan, Rinzai ou Joshu.

De la Chine au Japon, du Chan au Zen

Le Chan ne commença à décliner qu’à partir du douzième siècle et c’est à ce moment précis que Dogen, jeune moine japonais parti à la recherche du véritable enseignement en Chine, rencontra Maître Nyojo de l’école Chan. Celui-ci lui transmit le sceau du Dharma au bout de trois années, le reconnaissant comme son successeur et permettant ainsi à Dogen de rejoindre sa terre natale afin d’y implanter et d’y faire prospérer le Zen.

Le courant Zen et la pratique du zazen eurent beaucoup de succès au Japon et s’accompagnèrent du développement par les moines de plusieurs arts et techniques, soit directement importés de Chine, soit créés localement en intégrant des éléments du nord de la Chine et de la Corée. On peut citer comme exemple l’usage du thé ou l’esthétique simple et dépouillée.

Le zen japonais a été aussi fortement influencé par le taoïsme, dont on retrouve certains symboles et notions.

Du Japon à l’Occident

C’est un peu la même histoire qui poussa les pas de Maître Taisen Deshimaru vers la France, en 1967. Tout comme Bodhidharma et Maître Dogen avant lui, Maître Deshimaru insista sur le zazen, le désignant comme l’axe, la colonne vertébrale d’une pratique imbriquée dans le social et le quotidien.

Après sa mort en 1982, son enseignement est transmis par ses plus anciens disciples, dont Maitre Roland Yuno Rech.